Roches papier allumette

 

 

Affichage par année

1 affiche :

 

    [Roches, papier, allumettes]

    notice :
    Image (fixe ; à 2 dimensions)
    [
    Roches, papier, allumettes]. — [S.l.] : Roches papier allumette, . — 1 affiche (photocop. ) : n. et b. ; 30 × 21 cm.

    • Affiches par pays  : Canada
    • Lieux d’archivages  :
    • Liste des thèmes  : presse
    • Géographie, géopolitique et Histoire  :
    • Noms cités (± liste positive)  :
    • Presse citée  :
    • Vie des mouvements  :
    notes :
    descriptif :


    texte

    dessin (personne, encapuchonnée, avec stock de journaux en bandoulière et mettant le feu à un journal)

    vignettes (positions de mains pour le jeu « caillou papier ciseaux » « roches papier allumettes »

    texte :

    Roches

    Papier

    Allumettes

    Il y a la roche, partout, là, éternelle, comme indestructible. En elle se joue une nature duale, conflictuelle. On détruit un immeuble pour bâtir un condo, on abandonne ses vieux matériaux, sans faire grand cas du fait qu’une de ces briques servira peut-être un jour à casser la vitrine de ce qui l’a remplacé. Un mineur sud-africain consume sa vie pour elle, mais renverse les rôles et fait du produit de son exploitation l’arme de son émancipation. Elle construit les murs des prisons, mais canalise dans le poing serré d’une prisonnière sa rage de vivre.

    Elle est à la fois matérialité de nos oppressions et arme spontanément saisie par les désœuvré.e.s dans ces fragments de résistances qui parsèment le quotidien. Contre un ennemi qui lui fait face, lui impose un mode d’être, une cadence, un mouvement, elle est défense, légitime et spontanée. Elle détruit un pare-brise, une mâchoire de policier, et redevient, l’instant d’après, cette paisible violence en puissance, immobile, prête à servir la première cause qu’on lui proposera.

    Nommer le conflit, c’est l’encourager. Si la roche vise le corps d’un ennemi, le papier nomme l’ennemi pluriel. Dès lors, la relation duelle entre l’émeutier et le flic, entre la femme battue et son agresseur, devient rapport entre les opprimé.e.s et leurs oppresseurs. Leur idéologie est nommée comme telle, elle est prise à partie et attaquée. Par le papier nous pouvons diffuser nos idées, en débattre, réfléchir notre pratique politique, se rejoindre au travers d’expériences communes.

    Mais les mots seuls ne peuvent rien. Ils se retournent contre nous dès l’instant où ils se détachent du politique, dès qu’on les sacralise et qu’on les fige, dès qu’ils n’existent plus que pour eux-mêmes.

    Dès qu’ils s’enferment dans une tour et ne font que se répondre.

    Le papier doit faire vivre notre rapport au monde et, à tout moment, incarner le conflit. Parce que, arme puissante et sans maître.sse, il donne des ordres et subvertit les mœurs. Il propose à la roche des cibles à attaquer, lui impose des casernes à bâtir. Il fait exister nos dettes, notre statut civil, il dévoile violemment les pratiques douteuses de notre classe dirigeante. Et pourtant, il brûle si facilement.

    Le conflit se généralise, s’amplifie. Par le détournement, l’arrêt, le débordement, tôt ou tard, l’abcès crève. L’allumette est flamme fragile, éclairant un à-venir flou dont les contours obscurs restent encore à définir. Par la contagion, elle est aussi incendie consumant tout sur son passage. Entre l’espoir de sortir de l’obscurité et celui d’une consumation du « vieux-monde », l’allumette est ce « moment révolutionnaire » qui porte la possibilité d’une rupture. Ces moments révolutionnaires, tout comme la flamme de l’allumette, n’ont pas d’avenir déterminé. Un coup de vent peut éteindre la flamme encore frêle, comme les forces de l’inertie peuvent récupérer les brèches révolutionnaires, renvoyant l’enthousiasme du moment au néant. L’incendie, une fois déclenché, n’est plus contrôlable et suit son cours au-delà des prévisions des planificateur.trice.s de ce monde. Il fait disparaitre tout ce qui se dresse devant lui et, lorsque tout y sera passé, s’arrêtera, inévitablement, impuissant, devant une étendue de roches. Une fois braise fumante, l’incendie étouffé nourrit d’une nouvelle fertilité les aspirations qui prendront racine dans les cendres de l’histoire.

    Un jeu de mains, de vilain.e.s, de gamin.e.s, de complices et de conflits.

    Banal, hasardeux, répété tant de fois, à temps perdu, au corps à corps, trois objets, trois outils qui se complètent et offrent un champ des possibles, de potentielles forces.

    Au-delà du jeu, de ses règles imposées, de la violence qu’il impose, qui banalise nos souffrances, et délégitimise la rage, il est temps de tricher, car ce n’est ni un jeu ni une fatalité.

    À tout perdre, il vaut mieux tout prendre, il ne s’agit plus de gagner mais de vaincre.

    JournalRPA.com


    sources :

    https://mtlcontreinfo.org/roches-papier-allumettes-2/
    https://mtlcontreinfo.org/wp-content/uploads/2015/02/afficherpa.pdf