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[À Carnot le tueur]

Image (fixe ; à 2 dimensions)
titre :
[À Carnot le tueur]
adresse :
. — London Londres : [s.n.],
description technique (h × l) :
. — 1 affiche (impr. photoméc.), coul. (une  : noir , papier de couleur ) ; x × y cm
notes :
descriptif :


[ texte contre le président de la République Sadi Carnot (1837-1894) qui sera assassiné le 25 juin par Sante Geronimo Caserio ]

texte :

À Carnot le tueur

Si Carnot grâcie Vaillant, nons ne lui ferons pas grâce à sa réélection.
Un Sénateur. (Journaux du 3 février 1894.)

Le crime est accompli : hier à l’aube, comme en cachette, lachement entourée d’une bande de policiers-assassins et d’inconscients enfants du peuple, deguisés sous d’horribles et sanglantes guenilles militaires, la guillotine a été dressée. Puis la bande hideuse s’est glissée dans la prison pour jouir encore de l’agonie de Vaillant.

— Je suis prêt, a dit le camarade.

Et il est tombé héroiquement en poussant son cri sublime : Mort la Société bourgeoise ! Vire ’Anarchie !

À sept heures et demie les maquereaux de l’Aquarium étaient vengés...

Es-tu content, Carnot ?

Dans ton bouge luxueux, ancien nid de putains oh depuis se sont prélassés tons les tyrans, aux cotés de ta gueuse, tu as du jouir, bandit, petit-fils de guillotineur et de laquais ; l’ombre de Carnot-Samson est allé baiser Carnot-Deibler. Et quand le coup de couperet vint résonner de la place de la Roquette en ton cerveau atrophié. tri as souri heureux, te voyant réélu. Qu’importe une veuve, une orpheline ! Le pognon ou la mort, n’est-ce pas ta devise de malfaiteur !

Faudrait voir, cependant, canaille ! N’as-tu donc rien compris à ce qui vient de se passer : n’as-tu donc pas senti, entendu le long cri de grâce sorti des milliers de poitrines du Populo, hier inconscient, aujourd’hui révolté ; n’as-tu donc pas lu, crasseux imbécile, les fleuris, les pleureurs, les violents appels à la pitié de tout un monde d’écrivains, de penseurs, tes amis, tes partisans souvent, te suppliant de ne point faire tomber une tête, et cela au nom de l’intérêt bourgeois !

Non, tu n’as rien senti, tu n’as rien lu, étant inerte, étant ignare, et aujourd’hui, grâce à ta couardise, l’œuvre est faite, le fossé est creusé, et dedans, agonisante, se meurt la Pitié, non la tienne. mais la Pitié populaire !

Tes souteneurs et toi n’avez plus qu’à attendre la Mort, la mort sans phrase !

Vaillant, par son acte hautément révolutionnaire, impeccable et indiscutable, a fait tressaillir le coeur du Peuple ; en frappant dans la caverne des voleurs et des assassins, il a ouvert grandes les portes à la Révolution, et le flot populaire va passer, à peine rougi du sang des fatales représailles. Fini le temps des Panama et des fonds secrets, des cagnottes et des grands vols, l’heure de rendre gorge a sonné, c’est en vain que jetant un os à la meute hurlante des désespérés, vous avez envoyé un Baîhaut en prison, c’est le mur, c’est le réverbère qui vous attendent, et déjà grimacent vos hideuses faces d’affolés foirards.

Ça n’aura point été en vain que la longue et internationale série des martyrs de la Révolution anarchique aura défilé devant tes yeux, Compagnon de misère, Populo esclave ; Chicago, Xeres, Barcelone, Montbrison, Paris, autant d’étapes superbes, autant de victoires triomphantes pour l’Anarchie, pour la Liberté !

Et maintenant se forgent les revanches, et maintenant se préparent les vengeances populaires. Aux clous malheureusement sans effet materiel du martyr Vaillant, vont succéder les clous, porteurs de mort.

Aux bombes sonnant le tocsin des Rouges Pâques, aux bombes, appels désespérés à la Révolte, vont succéder les joyeux éclats des explosifs, tonnant en pleine bataille, sous le clair et lumineux soleil de la Révolution déchaînée ; et implacables, ils trieront ceux-là !

Car il faut que vous creviez, assassins, il le faut pour le salut du peuple, pour la gloire de la Révolution.

C’est pourquoi, mecq de la Guillotine, président de la Gueuse Bourgeoise, ta réélection n’est point si assurée : c’est pourquoi, hideux capou, dès maintenant tu ne cesseras plus de trembler.

Tu peux t’entourer de mouchards en bourgeois, de policiers en livrée, tu peux te terrer de terreur dans ton repaire de bandit,

Rien n’y fera, Sadi-le-Tueur ; passant outre, la Justice du peuple ira t’y frapper, s’il le faut.

Car c’est maintenant ta peau qu’on va viser, crapule !

— “Vous allez voir, bourgeois, comment meurt un anarchiste”, vous cingla à travers vos faces blêmes de coquins, tes associés, le martyr d’hier. S’il ne sera plus là pour jouir de tes lâchetés et de tes terreurs au moins en mourant aura-t-il pu entrevoir l’avenir si proche maintenant du réglement de compte révolutionnaire.

Quand toi et ta humide seront crevés, sublime et triomphante brillera la Revolution, l’Anarchie !

Tu as eu la tête de Vaillant, nous aurons la tienne, Président Carnot !

Vive l’anarchie

Un Groupe anarchiste.

Londres, 6 février 1894.


sources :

« À Carnot le Tueur », février 1894. Archives départementales du Maine-et-Loire (AD49 : 4M6/29) : affiche à destination de Mercier et Philippe (saisie) :
https://revolutionnairesangevins.wordpress.com/

cotes :