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[Les autonomes à Saint-Lazare : un réformisme aux couleurs radicales]

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[Les autonomes à Saint-Lazare : un réformisme aux couleurs radicales]
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. — Paris : [s.n.], [ ?] (Édit 71 (Paris))
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. — 1 affiche (impr. photoméc.) : n. et b. ; 46 × 33 cm
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Les autonomes à Saint-Lazare : un réformisme aux couleurs radicales

L’opéra-pour quatre sous

C’est fait : dans la valse des étiquettes, « l’Autonomie » casse tous les prix. Son label s’étale en lettres grasses sur toutes les vitrines du spectacle, de Libération aux informations télévisées.

Rarement un tel saccage ne s’est émancipé si radicalement de ces prétextes circonstanciels traditionnels, ne s’est organisé si délibérément.

De quoi faire trembler toute la racaille politique, de la Ligue Communiste au PFN, en passant par l’euromarchais, le garde des « sots » et le président de la République. Tous ces mensonges sont groupés en une sainte chasse à courre pour traquer ce spectre : la négation de la marchandise et de l’État.

Mais jamais une action si radicale ne s’est enchaînée si radicalement à une cause aussi méprisable, n’a proclamé aussi délibérément sa dépendance à l’égard du pire réformisme : la lutte contre la vie chère.

Voilà bien de quoi rassurer la même racaille. Et si les staliniens et les gauchistes déplorent cette concurrence extrémiste mal venue, tous se réjouissent d’un péril qui se ment assez bien à lui-même pour ne plus avoir à en falsifier la portée. L’essentiel est sauvé, la grande peur prend l’allure d’un combat d’étudiants pour l’aménagement des poubelles de la vie quotidienne.

La « paupérisation croissante » dont parle le communiqué des BAR n’est que la forme ultime d’une paupérisation de la vie elle-même.

Il est toujours plus difficile de « perdre sa vie à la gagner » et la marchandise, dont le développement quantitatif semblait pouvoir garantir, jusqu’en 68, le sommeil d’une foule d’esclaves et les pro-fits de leurs maîtres, présente aujourd’hui une abondance empoisonnée qui n’est même pas à la portée de toutes les bourses. Tous ceux qui étaient déjà fondamentalement pauvres n’ont même plus la possi-bilité de se croire riches.

Cette « mort chère » ne contraint évidemment pas les « masses prolétariennes à un suicide collectif inéluctable », comme voudraient le faire croire les auteurs imbéciles du communiqué des BAR ; mais elle les amène à choisir entre le développement de la barbarie actuelle et une révolution abolissant le travail, la marchandise, les classes et l’État.

Le maître-mot des autonomes : survivre.

Après les bêtes et les gauchistes, les « zootonomes » voudraient encore faire croire que l’homme est fait pour vivre de pommes de terre. Et ceci, en faisant leurs « achats politiques » (les basses quêtes), en « auto-réduisant » les néo-aliments vomis par les restaurants universitaires, en imposant la gratuité des droits de petits cadres (s’offrir les plaisirs sublimés du cinéma ou garrer son « atome-mobile dans les camps de concentration urbains, par exemple). Mais ils ne s’arrêtent pas là ; après avoir lutté pour habiter « sans bourse délier » leurs taudis squattérisés ou les rames puantes du « métro-police », ils prétendent élargir leur combat à la hausse des prix en général ! Voilà ce qu’ils cachent derrière leur verbiage révolutionnariste, leurs phrases telles que : « politique des besoins », « politique de la vie quotidienne », « salaires garantis pour tous ». Ces bouffons n’ont d’autre but en fait que de sauver par tous les moyens, et la politique, et le salariat, et la vie quotidienne, c’est-à-dire la trivialité de la vie réifiée par les pseudo-besoins de l’économie.

Héritiers du gauchisme décomposé par leurs origines étudiantes dégradées, leurs prétentions éducastratrices, leur démagogie, leur volonté de se faire reconnaître par toutes les puissances du vieux monde : média, partis, fausse et irréelle opinion publique(1) ; ils sont aussi le produit concentré en idéologie des principales contradictions des luttes du prolétariat moderne. Notamment des luttes ouvrières actuelles où l’affrontement avec les gardiens de l’aliénation, les défenseurs du prolétariat (qui ne défendent même plus seulement le travail salarié mais l’austérité et l’auto-limitation des grèves tout court), se déroule encore sur le terrain de l’aliénation, celui miné par avance de la conservation du travail (Lorraine par exemple).


Mais alors que les ouvriers apprennent, en se parlant sans intermédiaire et en s’organisant eux-mêmes, à rencontrer et à combattre l’ennemi qui est dans leur tête, à se critiquer, alors que les faux problèmes posés par l’atomisation des luttes empêchent encore un règlement global de la question sociale, mais se dépassent dès que les conditions le permettent (Caen et Saint-Nazaire. On sait de plus qu’une généralisation des grèves sauvages est possible à tout moment), alors que les ouvriers sont toujours plus contraints à ne plus combattre l’aliénation par des moyens aliénés, l’idéologie autonome fait tout pour maintenir l’aliénation, y compris par des moyens désaliénants.

Quand les bureaucrates staliniens et gauchistes sont mis à nu, le réformisme se rhabille avec les oripeaux de l’extrémisme. Ces enfants abârtadis de la contestation en miettes ont eux-mêmes jugé bon de se scinder sans vergogne en « militaros » et en « désirants ». Mais ces écoliers du P.38 et ces machines désirantes ignorent évidemment tout de la violence historique et du désir, occupés qu’ils sont à singer avec deux doigts ce que leurs homologues italiens ont fait avec des armes, ou à se prostituer avec les putes de Vincennes et Bologne réunies.

Mais nous n’identifions évidemment pas les plumes prostituées, les petits épiciers misérabilistes de la « marge » bénéficiaire, les chefs occultes qui font figure de leaders à « mascarade » ou à Tolbiac avec un grand nombre de jeunes prolétaires qui circulent dans cette « mouvance » et dont la rage de vivre est authentique.

Mais le meilleur service que l’on puisse rendre à un mouvement quel qu’il soit, est de critiquer impitoyablement toutes ses faiblesses ; comme le meilleur soutien que l’on peut apporter aux cama-rades victimes de la répression et à tous les emprisonnés, n’est pas d’apposer inutilement au bas d’une feuille les signatures de nos ennemis, ou de protester contre la seule répression, mais de poursuivre l’offensive en nous forçant à être de plus en plus intelligents, en liquidant chez nous ce qui appartient encore à l’ennemi.

Camarades anti-« militants » et anti-« politiques », l’isolement provisoire est de loin préférable à la communauté de la misère. Les gens qui fétichisent l’organisation en cherchant à s’allier à tout prix ou en sombrant dans l’activisme ne font que masquer leur manque d’autonomie réelle. Le désespoir ne suffit plus, le terrorisme fait le jeu de l’État, la lutte de classes existe ! Ce n’est pas le groupuscule d’étudiants qui se réclame de l’autonomie et de l’action de Saint-Lazare contre la vie chère qui fait peur au pouvoir dominant et à tous ceux qui voudraient prendre sa place, mais au contraire le mouvement prolétarien moderne, qu’ils ne font que représenter spectaculairement.

Ce mouvement a déjà dit sur la « vie chère » l’essentiel, le 14 juillet 1977 à New-York : « Les prix ont monté trop haut, maintenant il n’y aura plus de prix et quand nous aurons fini, il n’y aura plus de Brodway non plus ». Ne nous effrayons pas de nos propres gestes ; ils parlent suffisamment d’eux-mêmes.

L’autonomie réelle commence sur les ruines de sa représentation politique

Les ami(e)s de Mary Black

(1). Voir les nombreuses interviews accordées au « Matin », au « Monde », au « Nouvel Observateur », à « Libération », à la radio, à la télé, etc. Ces racketeurs se sont encore signalés récemment en faisant avec la LCR le service d’ordre d’une manifestation à Tolbiac et en condamnant les débordements de Saint-Lazare et les « casseurs » du passage Hebrard.

Imprimerie Édit 71 — 9, rue Auguste-Métivier = 75020 Paris — tél. 636.89.09


sources :

Journal mural R°/V° ou tract-manifeste ?

cotes :