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[Mathais assassiné]

Image (fixe ; à 2 dimensions)
titre :
[Mathais assassiné]
adresse :
. — Toulouse : CANT (Comité anti-nucléaire de Toulouse),
description technique (h × l) :
. — 1 affiche (impr. photoméc.), coul. (deux  : rouge , noir , papier blanc ) ; 42 × 30 cm
notes :
descriptif :


[ texte (article de C.-H. Mathais) ; filigrane (photo de Mathais) ]

texte :

Mathais assassiné

Claude-Henri Mathais était un des porte-parole de la Coordination Régionale Anti-Nucléaire.

Sa mort nous interpelle, nous renvoie à notre propre peur, à nos propres désirs de vie et de lutte.
Quelles que soient les causes du meurtre, elles font partie d’un système de production et de pensée qui ne peut accepter les différences.
Le combat antinucléaire est un des aspects de notre révolte contre toutes les oppressions. C’est ce que défendait Claude Henri Mathais dans ses articles pour le Géranium Enrichi (journal antinucléaire de Golfech). En voici un écrit le lendemain du 10 Mai 1981 :

« PÊLE-MÊLE, QUE MA JOIE DEMEURE...
GOLFECH, ROTONDE,
le 11 mai 81, 7 h 30.

Dans ma tête, peu à peu, les vapeurs de l’alcool se dissipent et laissent éclater l’Hymne à la joie : on a gagné !

On a gagné, voilà bien ce que tous gueulaient en arrivant à la Rotonde cette nuit, qui avec sa bouteille de champ, qui les bras grand ouverts, la face rubiconde et hilare, qui les larmes aux yeux à l’idée que ce soir peut-être, des années de lutte à Golfech connaissaient un tournant capital vers la victoire complète et totale. Quelle envie de vous serrer dans mes bras, ceux qui, toujours m’ont fait confiance comme ceux qui, un jour, m’ont jeté des pierres...

NOSTALGIE

C’est qu’en effet, ce soir, toutes les rancœurs s’effacent : on a gagné. L’accès à la Rotonde semble une voie royale, mieux, la Rotonde redevient le centre de gravité. Ce modeste témoin de la volonté d’hommes libres prend ce soir tout son sens. Face aux Cassandres qui nous criaient “à quoi bon” et nous promettaient le suicide du fond de leur fauteuil, face à tous ceux qui ricanaient, face aux vautours qui attendaient notre agonie pour se partager les dépouilles, nous n’avons pas lutté en vain !

Parfois, pot de terre contre pot de fer, l’espoir s’amenuisait mais l’ardeur combative restait là !

VENT DE LIBERTÉ

Partant battus d’avance, nous avons continué de marcher sous un ciel noir et bouché et voilà que, d’un coup, au plus fort de la tempête, l’horizon se dégage et qu’un franc soleil darde une chaleur bienfaisante.

Ce soir il souffle un vent de liberté... Mitterrand président, ça n’est peut-être pas le Pérou, mais c’est la certitude qu’on va pouvoir essayer. Sécurité et liberté, la loi scélérate de Peyrefitte, abrogée ; les 35 heures et la 5e semaine à négocier ; la censure royale sur les médias supprimée ; le droit à choisir quand et comment on aura son enfant ; le droit de vivre différemment sa sexualité par l’abrogation de l’article 331 du Code pénal imposé par Pétain en 42, conservé par De Gaulle en 46 et confirmé par Giscard en 1980 ; la suppression de la Cour de-Sûreté de l’État ; la promotion de la démocratie locale et directe, les femmes ayant le droit d’être pleinement elles-mêmes...

Que de choses, que de possibilités ! Je crois qu’il nous appartient de faire ressurgir toutes nos latences. Ce matin j’ai envie plus que d’habitude, de cultiver ce que je sens en moi, de goûter à tout, de vivre intensément, de vivre, de vivre...

VIGILANCE

Bien sûr, je sais que c’est à moi qu’il revient de marcher, nul n’avancera pour moi, mais je n’ai pas signé un chèque en blanc. Je crois que nous avons chassé un roi, profiteur et répugnant, pour un président sincère et intègre. Il nous faut rester vigilants, non pas pour lui forcer la main, seulement pour lui rappeler que nous sommes là, qu’il peut et qu’il doit résister aux pressions de toutes natures qui ne vont pas manquer de se multiplier. à tous les coups bas.

3e TOUR

La prochaine étape sera rude, il faut que la Chambre des députés corresponde au succès populaire d’aujourd’hui, qu’elle permette de poser les fondations de la société nouvelle que nous appelons de nos vœux.

QUE MA JOIE DEMEURE !

Alors, viens, n’hésite pas, même si d’aucuns prétendent que tu voles au secours de la victoire, même si c’est vrai d’ailleurs, je t’invite à la fête. La vraie fête, celle qui vient du cœur du peuple, franche et joyeuse, pas celle qui sort en corsert des salons des princes.

Viens, on va chanter et danser, viens rêver avec moi, prenons le temps de nous aimer... Que ma joie demeure, on a gagné ! »

C’était Mathais.
Le reconnaissez-vous dans les paroles et les écrits de ceux qui ajoutent à la mort physique du militant le dépeçage de l’individu ?
Ce flot de ragots nous écœure.
L’histoire de notre lutte contre la centrale nucléaire de Golfech continue.


sources :

Sur l’assassinat : http://www.sudouest.fr/2010/08/01/-151386-4583.php

cotes :

Aff1361 - 205412 (cira L)


1982
Affiche liée