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[Au peuple de Paris ! : manifeste-appel aux funérailles d’Aernoult]

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titre :
[Au peuple de Paris ! : manifeste-appel aux funérailles d’Aernoult]
adresse :
. — Paris : CDS_ (Comité de défense sociale : 1903-....),
description technique (h × l) :
. — 1 affiche (impr. photoméc.), coul. (une  : papier de couleur ) ; x × y cm
notes :
descriptif :


[ texte ]

texte :

Les funerailles d’Aernoult

Le Comité de Défense sociale a fait apposer sur les murs de Paris l’affiche suivante :


Au peuple de Paris !

Le 2 juillet 1909, un crime effroyable se passait à Djenan-ed-Dar (Algérie).

Un homme, un disciplinaire, était affreusement torturé par les chaouchs de ce détachement.

Pendant des heures, il lui fallut exécuter, par une chaleur épouvantable, une marche au pas gymnastique, sac au dos.

Harassé, ne pouvant plus marcher, les tortionnaires l’attachèrent aux fers, lui remplirent la bouche de sable, puis non contents de ces exploits, le frappèrent avec rage dans sa cellule.

Le soir, le pauvre enfant rendait le dernier soupir, en appelant sa mère…

Cet homme, ce soldat envoyé aux compagnies de discipline pour faits de grève, c’était :

Aernoult

***

Lorsque ces événements furent connus en France, grée au dévouement et à la dénonciation formelle du courageux Rousset, démasquant les assassins, il n’y eut qu’un cri dans le monde ouvrier et parmi la presse — qui s’indigna à cette époque — du crime de Djenan-ed-Dar.

Ici, un père et une mère pleuraient l’enfant qu’ils avaient vu grandir et partir à 20 ans, plein de force et de santé.

***

Des hommes appartenant à toutes les classes de la société entreprirent la campagne pour dénoncer les coupables et faire revenir en France la dépouille de celui qui, dans le Sud-Algérien, reposait loin des siens.

La campagne fut longue. Pendant deux années, avec une persévérance inlassable, sans se laisser rebuter par les refus réguliers que leur opposaient les gouvernants, ces hommes continuèrent la lutte.

Ils viennent enfin de triompher. Le corps du malheureux disciplinaire Aernoult nous est enfin rendu.

Dans quelques jours nous pourrons nous grouper derrière son cercueil et conduire à sa dernière demeure la victime des tortionnaires, des hideux chaouchs de Biribi.

Les obsèques d’Aernoult auront lieu le dimanche 11 février.

***

Le Comité de Défense sociale, qui a rempli une partie de sa tâche, ne s’arrêtera pas là. Il lui reste une autre besogne à accomplir : celle d’empêcher de faire un second cadavre d‘Émile Rousset, que le conseil de guerre d’Alger a osé condamner à 20 ans de travaux forcés pour un meurtre dont il est innocent.

Le Comité de Défense sociale fait appel au Paris ouvrier, au Paris qui pense et qui vibre pour tout ce qui touche ses enfants, au Paris qui ne permettra pas qu’une iniquité s’accomplisse sans que s’élève sa grande voix populaire et qui voudra, par sa présence aux Funérailles d’Aernoult, rappeler qu’il est de tout cœur avec celui qui, le premier, dénonça. le crime : avec Rousset, qui devrait être au premier rang derrière le corps de son camarade.

Il faut que dette manifestation populaire soit grandiose !

Il faut que le peuple travailleur, qui fournit chaque année l’impôt militaire, et dont les fils — pour des peccadilles — sont expédiés aux compagnies de discipline, vienne affirmer sa résolution de ne plus servir de jouet aux gradés alcooliques et que les Biribi ont assez vécu.

Par sa présence en masse aux funérailles de la victime, la classe ouvrière prouvera que l’époque des bagnes militaires est terminée et que les conseils de guerre — qui condamnent par ordre — ont fait leur temps.

Peuple de Paris !

Le Comité de Défense sociale compte sur toi !

Ta présence derrière le corps d’Aernoult lui donnera la force nécessaire pour poursuivre la lutte et faire rendre la liberté au héros de Djenan-ed-Dar :

à Émile Rousset

Le Comité de Défense sociale.


sources :

Le Comité de défense sociale annonce dans Le Libertaire du 3 février 1912 (18e année, n° 15) : « Le comité a décidé de faire poser sur les murs de Paris un manifeste demandant à la population ouvrière d’assister en masse aux funérailles du jeune Aernoult, assassiné par les chaouchs en Algérie. Les obsèques auront lieu à Paris, le dimanche 11 février […] »

Le texte de l’affiche parait dans Le Libertaire du 10 février 1912 (18e année, n° 16).

cotes :