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Grand meeting révolutionnaire
Organisé par les groupes anarchistes du XXe arrondissement
au profit des victimes de la police
Le jeudi 9 août 1888, à 8 heurs 1/2 du soir
Salle du Commerce
84, faubourg du Temple, 94
Ordre du jour :
La grève générale, sa nécessité, son but et ses conséquences
Les assommades policières et gouvernementales
Les expulsions des ouvriers étrangersOrateurs inscrits : Louise Michel, Tortelier, Leboucher, Tennevin, malato, Gouzien, J. Prolo, Espagnac, etc.
entrée 30 centimes
Lire tous les samedis La Révolte organe communiste anarchiste — En vente chez les libraires : 0,05 cent., le numéro
Paraît tous les 15 juins la Ça ira organe anarchiste — En vente chez les libraires : 0,10 cent., le numéro
Paris. — Typographie Vert Aîné, 8, rue François-Miron
sources :Autres orateurs : Pausader, Lutz, et G. Roussel d’après le Dictionnaire internationale des militants anarchistes.
http://militants-anarchistes.info/spip.php?article3188
http://militants-anarchistes.info/IMG/jpg/meeting_1888.jpg
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Élections législatives du 22 septembre 1889
(XXe arrondissement)À bas la politique !
Travailleurs !
Le plus écœurant spectacle que l’on puisse voir, c’est celui que présentent tous ceux de votre classe qui, trompés, bernés, roulés continuellement par les politiciens de tous les partis autoritaires, vont néanmoins participer à la bouffonnerie électorale en se rendant aux urnes.
Quoi ! Les leçons du passé seront donc toujours inutiles ! Quoi ! 40 ans d’expérience du suffrage universel ne vous ont-ils pas démontré non seulement l’impuissance du régime parlementaire, mais encore son hypocrisie ?
Nous avons de dures vérités à vous dire ; puisse notre voix être écoutée par vous, et nos efforts ne pas être inutiles.
Travailleurs, écoutez :
Vous n’êtes pas plus peuple souverain que ceux qui vous gouvernent ne sont vos valets. Durant toute votre existence de forçats du travail, vous usez votre intelligence et vos forces pour produire toutes les richesses qui s’étalent à la vue de chacun et dont la jouissance n’est permise qu’aux rusés qui vous exploitent. Vous subissez une immense injustice, puisque, créateurs de tout ce qui engendre le confortable pour les possédants vous êtes privés même du nécessaire. La Propriété. individuelle, cause de toutes les discordes sociales, permet à une minorité d’oisifs d’accaparer à leur profit la plus grande partie des richesses du globe sans s’inquiéter si la grande masse a sa suffisance : Vous êtes des victimes de la Propriété individuelle.
Jetez un coup d’œil autour de vous, voyez la manière dont vous vivez, les taudis que vous habitez, la pénurie de vos vêtements et de votre nourriture, passez en revue les tourments et les misères que vous subissez et que vous subirez encore, vous et vos familles, car pour vous tous l’avenir n’existe pas ; réfléchissez à tout cela, et ensuite souffrez qu’on aie l’ironie de vous appeler peuple souverain.
Peuple souverain, quelle audace ! Vous n’êtes que des damnés, des esclaves de la misère, et tous ceux qui aujourd’hui vous passent la main sur le dos pour mendier vos suffrages ne sont que vos futurs maîtres, qui, lorsqu’ils seront élus, sauront bien diriger contre vous le bâton du pouvoir. Car entre les électeurs qui sont des gouvernés, et les élus qui sont gouvernants, les intérêts sont loin d’être semblables : Ainsi vous tout à gagner d’un changement social qui anéantisse l’exploitation humaine, tandis que vos maîtres ont tout intérêt à faire durer celle exploitation infâme qui seule les fait vivre.
Malgré 40 ans de régime représentatif et 18 ans de république, n’êtes-vous pas comme sous l’empire ou la royauté, toujours les mêmes exploités qu’on flatte pour endormir vos défiances au moment des élections, et dont ou fait ensuite moins de cas que du bétail ? N’êtes-vous pas toujours les dindons de la farce ? Alors pourquoi aller aux urnes ? Pourquoi, en votant, donner une approbation à toutes les infamies et à toutes les misères que vous subissez ? Sachez-le donc une bonne fois, camarades de travail : Si la classe gouvernante et possédante détient entre ses mains un superflu de richesse qui vous fait tant besoin, c’est parce que vous lui donnez le droit de vous considérer comme des machines à produire pour elle. En votant, vous ne pouvez que sanctionner votre esclavage.
N’espérez donc pas à l’aide de bulletins de vote obtenir pour chacun sa place au banquet de la vie : Les détenteurs du capital, moins ignorants que vous, ne se sont jamais laissés et ne se laisseront jamais exproprier de bonne volonté ; ils ont à leur service la force armée (que vous leur fournissez) et qu’ils appellent la légalité ; et ils vous montreront toujours que votre droit n’est rien sans la force de le faire valoir.
Voila pourquoi il est aussi stupide d’attendre du suffrage universel un véritable affranchissement, que d’espérer un paradis dans un autre monde.
Voilà pourquoi, en vous entraînant à l’agitation électorale et en vous faisant gober la parade politique, tous les candidats, quels qu’ils soient, vous trompent et méritent la bastonnade.
Donc, Travailleurs, ayez moins de naïveté et plus d’énergie. Ne votez pas.
Abstenez-vous de prendre part à la mascarade autoritaire ; aux niais et aux coquins qui quémandent vos voix, répondez que puisque l’on vous croit assez sages pour choisir vos maîtres, vous seriez plus intelligents de vous en passer. Et envoyez au diable boulangistes et anti-boulangistes, républicains, réactionnaires ou socialistes parlementaires : tous se valent par le fait qu’ils sont candidats. Mais ne vous en tenez pas à cette abstention ; soyez convaincus qu’une Révolution violente et consciente seule peut faire naître une société plus naturelle, où la discorde et la propriété individuelle, c’es.-à-dire l’intérêt bestial, feront place à la solidarité et à l’intérêt général engendrés par le communisme anarchiste.
Les lois naturelles sont justes parce qu’elles sont simples à observer et qu’elles n’oppriment personne ; elles vous disent que nul n’a le droit d’exploiter son semblable : Souvenez-vous en !
L’inaction, c’est la mort morale, c’est l’abrutissement ; ayez conscience de vos forces, et au lieu de rester les bras croisés pour vous affranchir, Ouvriers, soyez enfin des hommes : Revoltez-vous !
À bas la Politique ! Vive la Révolution sociale ! Vive l’Anarchie !
POUR LES GROUPES ANARCIIISTES• DU XX° ARRONDISSEMENT :
Vu : Les Candidats pour la forme :
H. Bertrand, pour la 1re circonscription ;
B. Tessier, pour le 2e circonscription.Lire tous les Samedis La Révolte , organe des idées Communistes-Anarchistes
En Vente chez les principaux LibrairesImp. F. Harry, 54, rue des Archives.
sources :Affiche (APP : Ba 76) citée dans la note 38 de la page 235 de : Angenot, Marc.— Topographie du socialisme français, 1889-1890. — Nouv. éd. — Montréal : Discours social, 2005. — 347 p.
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Élections législatives du 27 janvier 1889.
Les Anarchistes au Peuple de Paris
Nos maîtres nous appellent aux urnes. — Qu’allons-nous y faire ?
Choisir sur les proclamations des candidats celui qui promet le plus de réformes ? À quoi bon !
Les législateurs peuvent être scélérats ou honnêtes ; peu importe ! Nos misères n’en seront ni augmentées ni atténuées.
Que nous font leurs dilapidations, leurs vols, ou leurs économies, à nous qui n’avons rien ?
Le gouvernement (monarchique ou républicain), est toujours aux ordres des capitalistes, sa seule mission est de faire respecter leurs richesses.
Toutes nos souffrances, toutes nos peines n’ont d’autre cause que l’organisation sociale actuelle, basée sur la propriété individuelle.
Tant qu’une poignée d’hommes pourront faire trimer l’ouvrier à leur profit ; tant que la terre, les usines, toutes les richesses sociales resteront entre les mains des fainéants, il ne pourra y avoir pour le Peuple d’amélioration.
Les républicains de la veille, proscrits de l’Empire : Clémenceau, Floquet, etc., eux en qui le Peuple avait toute confiance, ont-ils pu faire, depuis qu’ils sont au Pouvoir, une seule loi en faveur de l’ouvrier ?
Non ! — Donc, le salut n’est pas au fond des urnes.
Voter, c’est consacrer l’autorité, la rendre forte de notre approbation. Voter, c’est souscrire à notre exploitation, l’affirmer juste et immuable.
Abstenons-nous !
Voter pour Jacques, c’est voter le maintien de la misère actuelle, donner raison au Gouvernement.
Mais, n’allons pas par répugnance pour Ferry-Floquet, nous jeter dans les bras d’un nouveau maître !
Boulanger élu, qu’adviendra-t-il ?
La dissolution de la chambre ! Une Constituante. Puis une nouvelle Constitution… Or, nous ne vivons pas de Constitution, mais de pain !
Quel que soit ce Gouvernement de demain, il y aura toujours des patrons, des propriétaires, des rentiers, des parasites, pour vivre de notre travail.
Alors rien de changé sauf l’étiquette.
Voter pour Boulanger, c’est raffermir le principe d’autorité qui est en discrédit. C’est ne tenir aucun compte de l’expérience de tout un siècle qui nous montre — malgré les inventions et les découvertes modernes — le Peuple aussi exploité sous la République actuelle, que sous la Royauté et l’Empire.
Voter pour Boulanger c’est attendre d’une nouvelle incarnation gouvernementale le bien-être que seule la Révolution nous donnera.
Ni Jacques !! Ni Boulanger !!
Reste le menu fretin ; devons-nous voter pour Boulé ou un des candidats socialistes ? Pas davantage ! ce serait croire encore au suffrage universel, dont quarante années nous prouvent la duperie.
Garder notre vote, c’est garder notre dignité et notre droit de Révolte !
Nous seuls connaissons nos besoins : c’est une folie que se nommer des maîtres !
Aujourd’hui, il n’y a plus que deux partis en présence ; d’un côté : les socialistes qui se réclament du vote, la tourbe des vieux partis, monarchistes, impérialistes, républicains, boulangistes.
D’un autre côté : les Anarchistes, négateurs de l’autorité sous toutes ses formes : religieuse ou scientifique, capitaliste ou patronale, familiale ou étatiste. Ceux qui ne veulent vraiment : Ni Dieu Ni Maître, car l’Autorité est la cause première de la Propriété Individuelle et de l’oppression que nous subissons.
Il ne s’agit plus de changer de maîtres, mais de conquérir par la Force, la Terre et ses richesses, qu’une minorité de fourbes s’est appropriée.
Ce n’est qu’en détruisant toutes les institutions, tous les monuments du passé, que disparaîtront à jamais les lèpres hideuses de la Société actuelle, et que l’Humanité trouvera sa voie de Justice et de bien-être pour tous.
Mais, pour atteindre ce but, il faut que l’esprit de Révolte germe, grandisse dans nos cerveaux, et se manifeste par des actes énergiques et audacieux !
C’est par ce chemin et non par celui du Vote, que nous ferons la Révolution victorieuse.
Ne votons plus : Agissons.
Vive la Révolution Sociale & l’Anarchie !
Pour plus de développement de l’Idée Anarchiste, lire le Ça Ira et la Révolte, hebdomadaires.
Impr. du Ça ira, rue du [ XXXXX, NN ?] — Vu : le Candidat abstentionniste [XXX ?]
[…]
sources :Reproduction moderne.
Affiche (APP : Ba 76) citée dans la note 38 de la page 235 de : Angenot, Marc.— Topographie du socialisme français, 1889-1890. — nouvelle éd. — Montréal : Discours social, 2005. — 347 p.
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L’Immolation de Saint-Étienne
Le dieu Capital vient encore de s’offrir un sacrifice humain.
Les innombrables victimes individuelles qui tombent tous les jours sous l’implacable rigueur de son culte, ne suffisaient pas. Cette fois, c’est une hécatombe qui vient d’avoir lieu.
Du reste, ce n’est pas la première fois que cela arrive et le bassin houiller de Saint-Étienne paie, au Moloch moderne, de rudes tributs de viande.
Le 9 octobre 1871. soixante-douze mineurs succombaient au puits Jabin.
Un peu plus tard le même puits faisait deux cents victimes ; en 1887 quatre-vingt-dix mineurs étaient ensevelis au puits Châtelus, et deux cents à Verpilleux.
Cette fois, il y a plus de cent cinquante victimes, et la série n’est pas close, puisque les mineurs survivants et les familles de ceux qui sont morts, n’ont pas encore pendu ou écharpé tous les administrateurs et les actionnaires des mines.
Il est inutile de rentrer ici dans des détails que nul n’ignore aujourd’hui.
La tragédie souterraine de Saint-Étienne est connue dans toute son horreur ; nous ne saurions rien ajouter à l’éloquence brutale du fait.
Seulement, nous voulons faire remarquer aux mineurs qui se laissent rôtir comme de simples dindons qu’on mettrait à la broche, toute la canaillerie des bourgeois et de leur gouvernement.
Ces messieurs, — les bourgeois — parlent sans cesse de justice pendant que, sans y avoir aucun droit, ils encaissent les millions gagnés par les mineurs au prix intime de leur vie : leur rapacité est si grande, qu’ils ne veulent même pas en céder une infinitésimale partie pour prévenir et empêcher les explosions, et bien mieux pour nourrir les veuves et les orphelins.
Nous voulons faire remarquer aux mineurs tout l’odieux des condoléances officielles qui permet tent aux assassins de venir l’appeler, comme l’a fait cet imbécile et impudent Yves Guyot que, c’est pour la deuxième fois déjà qu’il apporte les sympathies du gouvernement aux malheureuses victimes du travail et aux familles si cruellement éprouvées (sic).
Il a du penser en lui-même J’espère bien que ce ne sera pas la dernière.
Peut-on imaginer un langage plus stupide et plus insolent que celui de cet endormeur transformé en fossoyeur.
Ainsi, cent cinquante mineurs viennent de périr dans des conditions si atroces, qu’aucune langue humaine ne saurait en donner une idée et comme compensation, M. Yves Guyot apporte pour la deuxième fois, aux familles de ces malheureux, toutes les sympathies du gouvernement. Comme c’est aimable !
On leur a fait, par dessus le marché, de magnifiques obsèques ; tous les voleurs qui s’engraissaient de leur travail et qui sont cause de leur mort, y assistaient ou s’étaient fait représenter.
La solennité a été imposante. Toute la garnison de la ville était sous les armes, toute la police était sur pied.
Il fallait bien ce déploiement de force pour protéger les assassins qui ont osé venir insulter et baver des discours menteurs sur les corps à peine froids de leurs victimes.
M. le ministre n’a pu faire admettre les idioties de son discours qu’avec l’appui des bayonnettes.
Monseigneur Foulon n’a pu dégoiser ses boniments que sous la protection des gendarmes.
Toute la séquelle gouvernementale et bourgeoise n’a pu organiser cette mascarade funèbre « que le Figaro a qualifié de splendide », qu’avec le concours de toute l’autorité armée.
Toute cette pompeuse et macabre cérémonie n’a eu d’autre but que d’étourdir la douleur de la population, pour détourner sa colère en donnant le change à ses ressentiments.
À la faveur de cet éblouissement, la Bourgeoisie a vivement fait enterrer les morts parce qu’il lui tardait de faire disparaître les traces du délit.
Eh bien ! Voilà !
À l’heure actuelle cent cinquante cadavres de plus gisent dans la fosse commune des prolétaires pour la plus grande gloire et le plus grand profit de la Bourgeoisie triomphante.
Il y a cent cinquante morts de plus à inscrire au martyrologe des travailleurs.
Cent cinquante assassinés de plus, à mettre à l’actif, déjà si énorme, de la Bourgeoisie.
Et tous les jours le nombre de ces assassinats s’en va grossissant dans une progression si accélérée que l’esprit du penseur pris de vertige et d’épouvante, s’arrête et ne sait plus que dire.
En face de l’universelle indifférence qui fait la responsabilité universelle, les imprécations les plus brûlantes se glacent sur les lèvres.
En effet, comment crier à la foule égoïste, que c’est elle qui est la cause de tant de malheurs et de tant de crimes ?
Comment lui dire : C’est toi qui fait les meurts-de-faim ! C’est toi qui occasionne le suicide des misérables ! C’est toi qui a permis, qui a voulu même, que cent cinquante malheureux de plus fussent carbonisés par le grisou.
Ô foule inconsciente ! foule idiote ! foule infâme ! foule lâche ! n’est-ce pas toi qui est l’auteur de tout, puisque tu peux tout empêcher et que tu laisses tout faire ?!
Et puis après ? Quand même on crierait cela, dix fois, cent fois, mille fois ; quand on passerait sa vie à le répéter, à quoi cela servirait-il ?
Cela ne servirait à rien, parce que la foule ne sait pas, ne voit pas, n’entend pas et ne comprend pas elle-même. Elle a abdiqué toutes ses facultés en faveur de ce que l’on appelle le Gouvernement ou l’Autorité.
La foule n’est donc rien, tant qu’elle admet l’autorité en son lieu et place. C’est l’autorité qui est tout, qui fait tout, qui répond de tout, qui assume tout.
C’est le mythe épouvantable auquel les populations se sont vouées ; c’est à lui qu’elles s’adressent quand elles sont affolées par une catastrophe, sans s’apercevoir que ce mythe, dernier avatar des religions mourantes, est la cause de tous leurs maux.
Les dirigeants, prêtres de cette monstrueuse divinité sont, mieux que quiconque, convaincus de son néant.
Mais, comme tous les prêtres exploitant une erreur qui leur profite, ils seront les derniers à reconnaître cette erreur.
Au contraire, ils n’ont d’antre souci que de la maintenir par tous les moyens.
Toute la presse est à leur solde et met ses formidables moyens de publicité, à leur service.
Ce qui devrait servir à répandre la lumière ne répand que l’obscurité. Ce qui doit proclamer la vérité ne proclame que le mensonge.
Voyez les journaux, parlant du sinistre de Saint-Étienne ; c’est un concert de banalités, de stupidités, de monstruosités :
Les uns relatent le fait, simplement comme une chose presque normale et prévue.
D’autres s’émeuvent doucement, pour la forme ; ils réclament modestement à l’autorité (toujours pour la forme) un peu plus de vigilance. Puis ils parlent d’organiser des fêtes, des divertissements et des kermesses.
Enfin, il en est d’autres, plus cyniques, qui, insensibles à la mort des cent cinquante malheureux, mentionnent avec chagrin, la perte pécuniaire qu’a dû éprouver la pauvre compagnie. Pour comble, ils insinuent avec une hypocrisie criminelle et ignoble, qu’une lampe retrouvée ouverte semble indiquer la cause ainsi que les responsabilités du sinistre.
Comme on voit, le mot d’ordre est donné : les sales débauchés qui nous gouvernent cherchent déjà à éluder la responsabilité du fait.
Puis leurs frivoles épouses organiseront une fête de charité, un bal de bienfaisance, où les bourgeoises jouant à l’austérité, arboreront pour la circonstance une sévère toilette de faille-anthracite, où leurs filles, cruellement coquettes s’exhiberont, féroces, en de délicieuses robes de satin d’une nuance feu — grisou — éclatantes.
Alors, au nom de la charité, toutes ces immondes putains, surchargées de parures et étincelantes de brillants, classeront et piétineront sur les cent cinquante cadavres, carbonisés pour payer leur luxe.
Et cependant, les veuves désespérées s’arracheront les cheveux ; les mères pleureront leurs fils et les enfants sans pain appelleront vainement leur père.
Quand tous les frais de l’orgie de charité seront payés il restera, petit-être, pour chaque famille, une pièce de cinq francs qu’on leur remettra si l’on y songe et la société aura fait son devoir.
Les bourgeois et les bourgeoises n’auront plus qu’à attendre une nouvelle explosion pour avoir un prétexte de plus à faire la noce. Tas de gredins !
Pourtant il faudra bien que tout cela finisse ! On se lassera de mourir d’inanition ; les familles se lasseront de se suicider ; les mineurs se lasseront de se faire carboniser.
Malgré toute la comédie philanthropique, le peuple ne sera pas toujours dupe et les temps sont proches où la grande liquidation des comptes, entre le peuple et la Bourgeoisie, va se faire.
Bourgeois scélérats ! les mineurs n’ont pas b-soin, de vos charités ; ils n’ont besoin que d’équité ; l’avez-vous pratiquée ? Ils n’ont besoin que de sécurité ; la leur avez-vous donnée ?
Bourgeoises éhontées ! les mineurs n’ont que faire de votre fausse sensiblerie et de vos astucieux sentiments ; ils ne leur faut que de meilleurs traitements ; y avez-vous jamais songé ?
La bruyante pitié que vous manifestez vous rend encore plus méprisables, car elle n’indique que votre peur et vos remords.
Et vous, journalistes de toutes nuances ! souteneurs avérés d’un régime d’assassinat et de brigandage ; sachez que ce n’est pas avec les sauteries que vous réclamez si effrontément, qu’on ressuscites les morts et qu’en nourrit les orphelins.
Vous avez l’indécence de chanter, de classer et de ripailler pendant que les autres pleurent et meurent de faim.
Vous prétendez mèler vos joies à la douleur des veuves en deuil et accoupler vos débauches à la tristesse farouche des mères désespérées.
Une d’entre vous, parée et travestie en un élégant costume de mineur, a osé, narguer les affligées et parodier le travail qu’elle ne connait pas.
Elle n’a pas rougi de souiller le costume des rudes travailleurs des mines. Cette cabotine, est allée, avec ostentation, distribuer de ses mains de viveuse, d’insultantes aumônes.
Elle a apporté un peu de l’or que les Rothschild volent aux travailleurs, de cet or tout suintant du sang des travailleurs et, précieusement, parcimonieusement, odieusement, elle en a donné (c’est restituer qu’il faudrait dire) un peu, très peu, aux femmes et aux enfants des travailleurs.
De quel droit donne-t-elle cet or ? l’a-t-elle gagné ? Ceux de qui elle le tient l’ont-ils gagné ?
Mais non I tous autant que vous êtes, vous l’avez volé.
Journalistes ! sous prétexte de justice ; de bienfaisance, de solidarité et de philanthropie ; vous passez votre existence en d’abjectes saturnales pour le paiement desquelles il faut toujours, finalement, que les prolétaires soient sacrifiés.
Pour satisfaire vos vices, vous vous vendez à la Bourgeoisie, vous trompez, vous égarez, vous abrutissez le peuple.
Vous êtes les complices de tous les méfaits et de tous les crimes bourgeois ; ils ont votre apostille, car après les avoir perpétrés par l. lente insinuation de vos fausses doctrines, par vos perfides complaisances, c’est encore vous qui les excusez et qui les palliez.
Ces crimes, après les avoir protégés tout, au moins par votre silence intéressé, vous cherchez à ensevelir leur responsabilité clans le flafla d’une charité à grand orchestre.
Et vous croyez que cela va durer ?
Non ! non ! la vérité luira.
Chacun sent bien que ce n’est pas le grisou qui a tué les cent cinquante malheureux. La vraie cause, ç’est vous, sales maquereaux du journalisme.
Ce sont vos prostitutions, vos vénalités, vos débauches, vos trahisons et vos mensonges qui, par leur complicité, rendent de tels crimes possibles.
Et vous osez parler de réjouissances ? allons donc ! parlez nous plutôt de vengeance !
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Lire La Révolte, organe communiste-anarchiste, 440, rue Mouffetard.
Le Père Peinard, anarchiste,120, rue Lafayette.Sous peu paraitra un journal anarchiste quotidien.
Pour les renseignement, s’adresser au compagnon Cabot, 33, rue des Trois-Bornes, à Paris, qui enverra la circulaire explicative.Reclus, imp. Clandestine, 33, rue dus 3 Bornes, Paris
sources :Placard de 1890, cité dans la notice « Cabot, Gabriel » du Maitron des anarchistes :
« Toujours en août [1890], il avait imprimé le placard “L’Immolation de Saint-Étienne” suite à la mort de 150 mineurs de la Loire dans un accident. ».